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9 juin 2006

Olivier Sangi, un poète pour la paix

"Allez choisir vos nouveaux dirigeants le 30 juillet"

à mon précieux ami

Plus que quelques jours avant la date fatidique du 30 juillet… Date à laquelle vont se tenir les toutes premières élections en République Démocratique du Congo depuis quarante ans. Pour inciter la population à aller aux urnes, la Mission des Nations Unies au Congo (MONUC) a mis en place un programme de sensibilisation dans les rues de la capitale. L'oralité tient bon dans les rues de Kinshasa.

Un bus bondé de la capitale. La chaleur et l'humidité sont étouffantes, il faut se frayer un chemin pour se trouver une place, bien calé à l'arrière du fourgon aménagé. Sur les frêles bancs en bois, vingt, trente personnes sont entassées là dans ce tombeau roulant. Soudain, une femme gémit. Sa main tient son ventre qui n'en peut plus. Elle va accoucher. Son mari tente de la calmer en lui disant de serrer les dents, qu'ils sont bientôt arrivés. Indignation générale. "Descends et emmène-la en taxi!", lui suggère un passager. Le débat s'engage. "Pas d'argent pour un taxi! Je suis fonctionnaire de l'Etat!", s'exclame le mari. Un autre passager de rebondir sur la mauvaise gestion du gouvernement, cause de la pauvreté de cet homme. "Le moment est venu d'aller voter si vous voulez que ça change", déclare-t-il.

En réalité, cette femme enceinte se porte bien, et son mari est un acteur, tout comme elle. C'est ce genre de saynètes que la MONUC élabore, avec la participation de l'Atelier Théâtre Actions et le groupe Mwaana Phwo d'Afrique. Les Mwaana Phwo sont menés par un certain "poète de la paix". L'Oeil de l'exilé l'a croisé il n'y a pas longtemps en RDC, c'était lors d'une de ses nombreuses prestations, d'ailleurs. Kinshasa abrite ce petit homme, puissant par ses paroles, impressionnant par le regard passionné qu'il pose sur la vie : Olivier Sangi Lutondo, fils d'un chef coutumier. Son pays a trop souffert, lui ne supporte plus l'apathie de ses politiques, textes en tête, il parcourt les salles de conférences à titre personnel, les bus pour le programme de sensibilisation… Mais attention à la concurrence sur le terrain! "Dans les bus, quand on repère un pasteur monter, vite il faut mettre en marche la représentation, sinon il prend la parole et nous sommes fichus, il prêche pendant des heures", raconte le poète. Des représentations qui semblent informelles, mais il faut des autorisations pour cela: "Nous avons présenté nos textes aux autorités, ils ont été validés par la Commission Electorale Indépendante et l'Hôtel de Ville nous a délivré une autorisation. Mais toutes ces formalités, c'est la MONUC qui s'en charge".

En vers et contre tout
De son côté, cela fait des années qu'Olivier Sangi répand sa parole devant les assemblées. Ses sujets de prédilection : la paix, l'amour, le respect de la femme, et depuis peu, les élections. Quand on lui demande quel est son bureau, il répond: "mon bureau c'est la rue". Le jour, la nuit, quand l'inspiration vient, il faut la coucher sur papier, à tout moment. Lui-même le dit, parfois on le prend pour un fou, mais c'est en réalité un fou-sage, qui pense et repense le monde, rêve de paix pour son pays. Dans son quartier, Olivier passe presque inaperçu, toujours un enfant à la main… Mais quand le poète de la paix s'apprête à parler, il revêt sa tenue traditionnelle: recouvrant le côté gauche de son corps, une peau de léopard, symbole de vérité et de justice. En travers, le drapeau de son pays la RDC. Autour de son cou, le masque Mwaana Phwo, "la Joconde africaine", comme il aime l'appeler, elle porte en elle la jeunesse éternelle, c'est devenu le symbole du Poète de la paix. Pour couronner le tout, un chapeau en forme solaire vissé sur la tête, lien visible de la proximité entre l'homme et l'énergie de la vie, le soleil.

"Les enfants sont des ancêtres qui reviennent"
Jamais sans ses masques… ni sans ses enfants! Le Poète de la paix n'est jamais seul. Ses enfants l'inspirent, veillent sur lui, car pour Olivier, "ce sont les ancêtres qui reviennent en eux". Dans sa maison intime, la lumière reste tamisée, des livres jonchent sur son bureau et ses étagères, il a sa petite dernière au bras, son autre main écrit. Un texte sur le Sénat français, inspiré de sa visite à Paris. Quatre paires d'yeux ronds et brillants l'observent. "Je veux être poète comme papa", ânonne son fils Patrick de dix ans. "Pour dire que la guerre ça tue les gens". Lui en connaît déjà par cœur des poèmes. Bien sûr, c'est avec papa qu'il les écrit, mais il n'en est pas à sa première représentation. "La paix, pour nous les enfants du Congo, tués par la guerre, abandonnés, nous voulons la paix, chers papas, chers mamans, donnez-nous la paix…" Il y met tout son cœur, tout son corps. Pour les élections 2006, il parcourt la province avec son père et s'adresse aux grandes personnes : "En âme et conscience s'il te plaît va voter le 30 juillet".

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